Camp en mouvement de Versailles au Met : Élisabeth Vigée Le Brun et Marie-Antoinette

par Ivana Dizdar

 

Ivana Dizdar est historienne de l’art et commissaire d’exposition. Elle est titulaire de masters en histoire de l’art et en études en conservation des universités Paris 1 Panthéon-Sorbonne et Columbia à New York. Ses recherches portent sur la relation entre l’art contemporain et l’art du long XIXe siècle. —

 

Fig. 1 : Elisabeth Vigée Le Brun, Marie-Antoinette en grand habit de cour, 1778, 273 x 193,5 cm, Kunsthistorisches Museum

Marie-Antoinette savait se camper bien avant qu’on ne lui attribue une sensibilité camp. Pour son premier portrait peint par Élisabeth Louise Vigée Le Brun, la reine commande une toile plus grande que nature. Elle se tient fière et confiante (pourquoi ne le serait-elle pas ?). Son allure fait de l’ombre aux objets qui l’entourent, que ce soit une couronne royale ou le buste de son mari Louis XVI. Portant une élégante robe de cour ornée de paniers de satin blanc cassé, presque doré, d’une traîne fleurdelisée, et une aigrette de plumes fichée dans sa coiffure haute, la souveraine nous ignore. Son regard semble lointain, porté au-delà du cadre, vers un avenir prometteur. Depuis cette commande pour la cour de Vienne, exécutée en 1778 à Versailles, Marie-Antoinette en grand habit de cour (Fig. 1) a voyagé et été exposé dans bon nombre d’endroits que la reine elle-même n’aurait pu imaginer. En 2016, par exemple, le portrait fut déplacé du Kunsthistorisches Museum de Vienne vers le Metropolitan Museum de New York pour une rétrospective majeure de Vigée Le Brun. Plus récemment, en 2019, une reproduction du portrait peint par un artiste anonyme, Marie-Antoinette, reine de France, et appartenant au musée national des Châteaux de Versailles et du Trianon fit à son tour le voyage au Met pour se retrouver dans un environnement complètement différent. Suspendue contre un mur rose dans un cadre blanc minimaliste, Marie-Antoinette trônait au centre physique – et peut-être même conceptuel – de l’exposition Camp: Notes on Fashion.

Organisée par Andrew Bolton, conservateur en chef à l’institut du Costume du Met, l’événement avait pour ambition de retracer le développement de la sensibilité camp. Étant donné la complexité et la richesse de cette notion, l’exposition ne pouvait être que partielle et sélective. L’expert Fabio Cleto, parlant d’un terme nébuleux et difficile à définir, associe pourtant le camp à « une chose qui se manifeste, simplement[1] ». Le camp a pendant longtemps été considéré comme un phénomène sous-culturel, jusqu’à ce que des critiques et théoriciens s’y intéressent au milieu du XXe siècle et le fassent ainsi passer de l’ombre à la lumière. Les plus éminents d’entre eux, l’écrivain Christopher Isherwood et, plus tard, la philosophe Susan Sontag, ont décrit le camp comme un concept à la fois esthétique et culturel, une manifestation du glamour et de l’extravagance, un phénomène connotant simultanément l’exagération, l’artifice, l’humour, la parodie, l’ironie, la naïveté, la théâtralité et le plaisir[2]. À différents degrés, les deux auteurs entrevoient le lien, aujourd’hui bien établi, entre le camp et la politique queer, la culture gay, le non-conformisme de genre et les pratiques anti-patriarcales, l’associant à une forme de résistance face à l’ordre dominant. Bolton et le Met ont accueilli ces déclinaisons du camp, pour créer une expérience muséologique : une invitation au voyage à travers l’esprit camp – éclectique, excessif et amoureux de l’amour.

Conçue dans l’esprit camp, l’exposition Camp: Notes on Fashion brouillait les frontières entre l’art noble, l’art populaire et le non-art pour créer un espace où les grands maîtres côtoyaient des artistes pop et des vêtements à la pointe de la mode, avec Judy Garland en arrière-fond musical. En prenant pour référence le célèbre essai Notes on Camp (1964) de Sontag dont elle mime le titre, cette exposition à succès présentait des objets datant du XVIIe siècle jusqu’à aujourd’hui et se structurait en deux grandes parties. Transhistorique plutôt que chronologique, la première partie accumulait peintures, sculptures, dessins, photographies, matériaux d’archive, textes, gravures, objets décoratifs et pièces de haute couture. Les musiciens de Caravage (1597, Fig. 2) y côtoyaient des manuscrits d’Oscar Wilde, des boîtes de soupe Campbell d’Andy Warhol, des robes cocktail de Cristobal Balenciaga, ainsi que des portraits photographiques de Greta Garbo et de Marlene Dietrich. La deuxième partie, présentant près de deux cent mannequins sur deux étages, mettait en scène des ensembles et accessoires modernes et contemporains, conçus aussi bien par des marques de renommée mondiale comme Burberry, Versace et Dior, que par des labels moins connus comme Ashish.

Fig. 2 : Caravaggio (Michelangelo Merisi), Les musiciens, 1597, 92,1 x 118,4 cm, Metropolitan Museum of Art

Pourquoi et comment Marie-Antoinette et son portrait peint par l’artiste Vigée Le Brun se sont-ils retrouvés parmi cette foule d’objets ? On aime considérer aujourd’hui Marie-Antoinette comme une figure camp, étant donné son style vestimentaire recherché et son aptitude à poser dans différents rôles : dans le catalogue du Met pour Camp: Notes on Fashion, Cleto soutient  à ce propos que « Marie-Antoinette et les effets de mode qu’elle générait, sur fond de la révolution française, étaient possiblement les plus camp de tous[3] ». Le caractère camp de Marie-Antoinette ne peut cependant pas se lire comme une donnée statique et immuable. Comment le circonscrire, en effet, étant donné que le portrait de la souveraine a été repositionné, non seulement du point de vue historique et géographique, mais aussi herméneutique, notamment dans sa relation au camp qui a lui-même évolué ?

Dans le portrait original de Vigée Le Brun, Marie-Antoinette en grand habit de cour, la reine témoigne de son aptitude à prendre la pose ainsi qu’à se cadrer dans la composition, comme si elle effectuait une apparition sur scène. La souveraine se tient droite, ce qui la rend presque imposante, une attitude que Mary D. Sheriff n’hésite pas à qualifier d’architectonique[4]. Le portrait nous ramène à l’apprentissage du maintien que la reine a reçu d’un maître de danse français, lequel lui avait inculqué l’aptitude à rester gracieuse tout en portant de hauts talons, une crinoline et une traîne[5]. Vigée Le Brun s’est ainsi évertuée à représenter une figure distinguée, sérieuse et digne, endossant pleinement le comportement et l’allure attendus d’une reine. Même si l’artiste reste fidèle à l’apparence physique de Marie-Antoinette, sans dissimuler les caractères physionomiques qu’elle tient des Habsbourg, elle adoucit les traits et se concentre sur le teint pour le rendre rayonnant, jeune et sain[6]. La reine tient une rose qui fait ressortir la couleur de ses joues.

La souveraine Marie-Antoinette apparaît dans son élément, un décor évoquant la salle d’un palais. Derrière elle se trouve une colonne symbolisant le pouvoir royal[7], une colonne si imposante que des historiens d’art la considèrent comme une gaucherie de débutant, le signe que Vigée Le Brun n’avait pas encore atteint la maîtrise de l’échelle et des proportions[8]. Bien au-dessus de la souveraine, sur un piédestal orné de l’allégorie de la Justice, se trouve le buste de son mari, le roi Louis XVI. La couronne royale repose à ses côtés, sur un coussin luxueusement décoré, posé lui-même sur une nappe de velours rouge rehaussée d’ornements dorés. La taille de la colonne et la hauteur du buste affirment de toute évidence l’autorité du pouvoir royal. Malgré tout, aucun de ces attributs ne parvient à rivaliser avec l’allure fière et noble de la personne, Marie-Antoinette se trouvant subtilement mise en relief par un rayon de soleil.

Avant la commande de ce tableau, la reine cherchait non sans difficulté un portraitiste capable de reproduire de la manière la plus juste son image, déclarant dans une lettre à sa mère « les peintres me tuent et [me] désespèrent[9] ». Vigée Le Brun a probablement attiré l’attention de la reine aux alentours de 1776, après avoir été invitée à peindre des portraits du comte de Provence et sélectionnée au même moment pour reproduire des statues royales au cabinet de Louis XVI[10]. Marie-Thérèse d’Autriche, n’ayant pas vu sa fille depuis qu’elle avait été envoyée à Versailles pour épouser l’héritier de la couronne de France, réclamait un portrait de la jeune princesse devenue dauphine puis reine[11]. Elle ne se souciait pas de recevoir un portrait fidèle. Malgré le « fond de tendresse maternelle bien vive[12] » dont elle se déclarait animée, elle voulait avant tout savoir comment sa fille avait grandi, comment elle se comportait et s’habillait – c’est-à-dire comment elle incarnait l’autorité politique conférée par son mariage. Le portrait final donna pleine satisfaction aux deux reines et assura ainsi à Vigée Le Brun la place de portraitiste en titre de Marie-Antoinette[13].

Peut-être Marie-Antoinette en grand habit de cour contient-il déjà des indices du changement de style et de personnalité qui commençait à s’opérer chez la jeune reine de France ? Un changement qui, contrairement aux attentes, dérogeait aux conventions du portrait officiel pour aller vers quelque chose de plus excessif et de plus excentrique. La dérive est légère cependant : le tableau ne nous frappe pas comme participant d’une véritable sensibilité camp. Le cadre, le décor, les attributs, le langage corporel et la composition respectent dans les grandes lignes les normes de la peinture royale traditionnelle[14]. On peut alors s’interroger : pourquoi l’exposition du Met Camp: Notes on Fashion a-t-elle voulu présenter ce portrait de Marie-Antoinette au lieu d’un autre[15] ?

Fig. 3 : Elisabeth Vigée Le Brun, Marie Antoinette en chemise ou en gaulle, 1783, 93 x 79 cm, Sammlung von Ludwig von Hessen und bei Rhein, Schloss Wolfsgarten in Hessen

Vigée Le Brun a en effet produit des portraits de Marie-Antoinette qui, au moins en apparence, s’accordent plus clairement avec la sensibilité camp. Au moment où l’artiste en venait à s’accorder une plus grande liberté de style[16], la reine elle-même délaissait les conventions et les formalités de cour, préférant les contenus inattendus, l’expression de sa subjectivité qui se traduisait surtout par l’invention de jeux de rôle. Son portrait le plus célèbre, Marie-Antoinette en chemise ou en gaulle (1783, Fig. 3), marquait un écart sans précédent dans la représentation qui pouvait être faite d’une reine. La peinture, dans laquelle Marie-Antoinette apparaît vêtue d’une simple robe de mousseline blanche, fut jugée si explicite, si indigne et si indécente qu’elle fut retirée du Salon. Le tableau aurait donc été plus approprié pour l’exposition Camp: Notes on Fashion car, selon Mark Booth, les représentations camp « rendent gaiement publique leur immoralité[17] ». Le Met aurait également pu exposer une version de Marie-Antoinette à cheval (1783, Fig. 4) de Louis Auguste Brun, qui représente la reine dans une tenue masculine, une livrée de chasse. Le musée aurait aussi pu exposer une gravure plus osée représentant Marie-Antoinette portant une frégate dans les cheveux pour saluer l’engagement de la France dans un combat naval contre la Grande-Bretagne[18] (Fig. 5). En dépit de toutes ces possibilités, c’est la reproduction de Marie-Antoinette en grand habit de cour qui a finalement été retenue et accrochée au mur rose de la galerie.

Fig. 4 : Louis Auguste Brun, Marie-Antoinette à cheval, 1783, 60 x 66 cm, Le château de Versailles
Fig. 5 : Anonyme, Le négligé galant ornés de la coéffure à la Belle-Poule, 1778, 33,7 x 50 cm, Bibliothèque nationale de France
Fig. 6 : Pietro Tacca, Belvedere Antinous, environ 1630, 64,6 × 28,4 × 20,3 cm, J. Paul Getty Museum. Digital image courtesy of the Getty’s Open Content Program

L’exposition s’ouvrait avec des considérations sur « Le Beau Idéal », un concept du début du XIXe siècle cherchant à définir l’archétype de la beauté masculine[19]. Mis sur des piédestaux, au sens propre comme au sens figuré, se trouvaient des corps d’hommes idéalisés. Les représentations pouvaient aller de la photographie conceptuelle de Hal Fischer, Archetypal Media Image (1977), mettant en évidence le dos d’un mannequin masculin, à des statues classiques exhibant des muscles abdominaux ciselés en bronze poli. Une de ces sculptures était L’Antinoüs du Belvédère (v. 1630, Fig. 6) de Pietro Tacca, représentant Hermès, une icône de l’homoérotisme. Située au centre de la première galerie aux murs roses, L’Antinoüs incarnait l’éloge de la beauté, de l’attirance et de l’amour gay, des thèmes mis en avant par l’exposition. Cette sculpture et le sujet de Fischer, ainsi que deux mannequins masculins torses nus vêtus de leggings Vivienne Westwood, y adoptent le même contrapposto flatteur, leur poids reposant sur une jambe, un bras posé sur la hanche de manière provocatrice, le coude fléchi vers l’avant avec ostentation.

Fig. 7 : Hyacinthe Rigaud, Portrait de Louis XIV, 1700-01, Musée du Louvre

L’Antinoüs avait été une source de fascination pour Louis XIV, qui acquit la sculpture de Tacca durant son règne. Ce n’est sans doute pas une coïncidence si, dans son propre portrait peint par Hyacinthe Rigaud (1701, Fig. 7) aussi exposé dans Camp: Notes on Fashion, Louis XIV adopte une pose similaire à celle de la sculpture. Avec une jambe élégamment posée devant lui et une main sur la hanche, le roi parade dans une robe cérémonielle de velours bleu garni de fourrure ; il porte des souliers ornés de boucles et de talons rouges, symboles prééminents de la stature sociale dans la mode masculine du baroque[20]. Tout comme Marie-Antoinette plus tard, Louis XIV avait reçu des cours de maintien qui avaient développé sa passion pour la danse, traduite dans le portrait par la posture droite, la délicatesse de l’allure et le galbe accentué des jambes[21]. Exhibant sa grandeur de manière ostentatoire, le roi devient ainsi l’exemple parfait de la théâtralité du camp. Il n’est pas surprenant que Cleto fasse remonter les origines étymologiques du mot camp au terme français se camper et à l’italien campeggiare[22] – une action théâtrale associée à une posture qui se démarque, l’acteur cherchant (et obtenant) l’attention des autres.

Fig. 8 : L’artiste a également créé un panorama à grande échelle sur le même sujet. John Vanderlyn, Panoramic View of the Palace and Gardens of Versailles, 1818-19, 3,6 x 49,5 m, Metropolitan Museum of Art

Il n’est pas non plus étonnant que les racines du camp soient associées à la France, notamment à Versailles, qui était aussi représenté, dans Camp: Notes on Fashion, par une gravure de l’artiste néo-classique John Vanderlyn datant de 1818 et montrant les jardins, avec en premier plan le bassin de Latone (Fig. 8). Sontag a également fait une allusion à Versailles, courte mais pertinente, dans son essai fondateur. Selon Cleto, Versailles était le site originel du camp : un endroit où le style, la flamboyance et le drame « transformaient la réalité en une scène[23] ». De plus, d’après Booth les adeptes du camp considèrent « le Versailles de Louis XIV comme une sorte d’Eden, une autarcie vouée au divertissement, à l’exhibitionnisme et au scandale[24] ». Louis XIV s’érige ainsi comme le prédécesseur du camp, une réputation partagée avec Marie-Antoinette, cette Autrichienne pourtant mal reçue à Versailles avant qu’elle n’en devienne la figure emblématique dans l’exposition du Met.

Fig. 9 : Robe à la Polonaise, environ 1780, Metropolitan Museum of Art

Marie-Antoinette, reine de France, la copie de Marie-Antoinette en grand habit de cour, était exposée dans une sous-section intitulée « Sontagian Camp ». Cette section mettait en relation des objets ou groupes d’objets présentés sur fond rose, comme les œuvres dans « Le Beau Idéal », disposés dans des vitrines presque aussi hautes que le plafond et encadrés dans les mêmes nuances de roses. Le portrait de Marie-Antoinette apparaissait à côté d’une robe d’époque à la polonaise (Fig. 9) et d’une pièce de chinoiserie de la manufacture Höchst, datant de la fin du XVIIIe siècle (Fig. 10). Au-dessus des vitrines, un écran digital parcourait les contours de la salle. L’essai complet de Sontag y défilait, note par note, le bruit d’un clavier se faisant entendre en fond sonore. Dans sa note treize[25], Sontag retraçait les origines du camp au XVIIIe siècle et soulignait la coutume à Versailles de vouloir rendre la nature artificielle[26].

Fig. 10 : Höchst Manufactory (attribué à Johann Peter Melchior), Audience of the Chinese Emperor, environ 1799, 39,8 x 33,2 x 21,7 cm, Metropolitan Museum of Art

Le Petit Trianon avec ses jardins, bâti sur les terres de Versailles, est un parfait exemple de l’attrait de Marie-Antoinette pour l’artifice. Louis XVI lui avait offert cette demeure, dédiée à ses usages et plaisirs personnels, lors de son accession au trône en 1774 alors qu’elle n’était encore qu’une adolescente. Au fil des années, la souveraine y fit construire une maison d’été, une ferme, une grange, deux laiteries, un poulailler, et même un théâtre et un terrain de jeu de boules, le tout entourant un bassin artificiel. À la différence de Versailles, construit pour impressionner par son luxe et sa splendeur, le Trianon est décoré de manière délibérément modeste, afin de créer une illusion d’authenticité[27]. L’endroit était pour la reine un refuge, lui permettant de se fantasmer en « une éternelle adolescente[28] », qui jouerait à être paysanne, vachère, fermière, s’abandonnant à la fantaisie d’une vie simple dans un monde éloigné du sien[29].

Avec le Trianon, la reine s’était fabriqué un endroit pour elle. Elle en avait fait son royaume, une sorte de terrain de jeu où elle pouvait établir ses propres normes et laisser de côté les conventions usuelles de la cour[30]. Elle le transforma, à la manière du camp, en un lieu de vie où l’esthétique imprégnait le social, un lieu d’expérimentation et d’innovation en matière de mode, de loisir et de jeu. Marie-Antoinette prenait plaisir à organiser des pièces de théâtre et des fêtes élaborées, en invitant même des artistes de cirque ; des mascarades sur des thèmes variés n’étaient pas sans rappeler les divertissements costumés dont raffolait la Renaissance[31]. Le Trianon, écrit Xavier Salmon, « [permit] à la souveraine d’être femme[32] ». Mais il était aussi devenu l’endroit que le peuple associait aux dépenses frivoles de la souveraine, un comportement contre lequel sa mère et ses conseillers l’avaient pourtant prévenue, et qui lui valut le surnom de « Madame Déficit ». Bien qu’animés par des intérêts différents, les aristocrates comme les gens du peuple s’accordaient sur la haine qu’ils éprouvaient envers la reine. Tous l’accusaient d’avoir épuisé les fonds de la nation dans des activités frivoles et d’avoir ainsi contribué aux immenses inégalités économiques qui condamnaient la majeure partie des Français à la pauvreté, à la famine et à la souffrance[33].

Les loisirs et l’attitude de Marie-Antoinette contrastaient nettement avec ce qu’on pouvait attendre d’une reine. Tandis que des souverains plus conventionnels, comme sa belle-mère Marie Leczińska, se conduisaient en accord parfait avec l’étiquette formelle de la cour et restaient loin des projecteurs, Marie-Antoinette attirait l’attention par son train de vie extravagant et ses tenues flamboyantes[34]. Avec Marie-Antoinette en grand habit de cour, la reine avait réussi à se donner une image de bonne souveraine, une image de laquelle elle s’est éloignée rapidement pour devenir une personne différente : une reine déviante. Elle n’est pas le premier souverain au sein de la cour à s’être créé volontairement un statut parallèle. Durant son règne, Louis XIV avait poussé les nobles à s’éloigner de la politique ; à Versailles, ils étaient étourdis de divertissements avec le roi comme maître de jeu et comme surveillant. Cette forme de désactivation sociale s’est révélée être une condition nécessaire à la naissance du camp, une sensibilité intrinsèquement marginale, et a fait de Versailles ce que Booth décrit comme un « paradigme de la haute culture camp[35] ».

À la différence de Louis XIV, le personnage que s’était créé Marie-Antoinette n’était pas exclusivement le fruit d’un choix ni d’un habile calcul politique : femme, étrangère et reine par alliance, longtemps incapable de donner de protester contre les conditions qui lui étaient imposées par la raison d’État. Et la mode s’enlignait sur la sensibilité camp : amusante, souvent ironique, parfois offensante, elle s’écartait toujours de la dualité de goût bon-mauvais prônée par le jugement esthétique ordinaire[36], sans parler du jugement esthétique de la cour.

Les historiens de la mode citent les stylistes de Marie-Antoinette comme étant les précurseurs de la haute couture française moderne. La plus importante d’entre eux était la célèbre parisienne Rose Bertin, facétieusement surnommée « la ministre des modes », qui a influencé l’appétence de la reine pour des styles élaborés, amalgames de tissus opulents comme le velours, excessivement façonnés de plis, de ruches et de nœuds et surchargés de parures de bijoux et de plumes. La coiffure n’était pas en reste en termes d’extravagance. Connu comme Monsieur Léonard, le coiffeur de Marie-Antoinette, l’homologue de Bertin dans le monde de la coiffure, inventait et créait sur la tête royale les confections les plus exubérantes. Chacune s’érigeait comme une œuvre d’art singulière. Établies sur des échafaudages en fil de fer, les coiffures – nommées poufs – mêlaient la gaze et les crins de cheval aux cheveux de la reine. Crêpés bien au-dessus de son front et recouverts d’une épaisse poudre blanche (un des ingrédients de cette poudre était la farine, ce qui aurait attisé la colère d’une population française affamée[37]). Entre les tresses et les boucles, chaque pouf se présentait comme une sorte de nature morte, comprenant un étalage d’objets, de matériaux divers et d’authentiques végétaux comme les fruits et les légumes[38] – des accessoires en phase avec l’esthétique pastorale du Trianon tout en maintenant la relation du camp avec l’artifice.

Marie-Antoinette et ses stylistes étaient évoqués, dans la deuxième partie de l’exposition Camp: Notes on Fashion, à travers, entre autres, les créations de Vivienne Westwood et de Moschino. Les deux marques s’inspiraient des robes de cour du XVIIIe siècle pour créer des ensembles qui alliaient tenue courtière traditionnelle et style contemporain. Les costumes apparaissaient en fait comme des sortes de collages, confectionnés à partir d’un assortiment éclectique de tissus aux couleurs disparates, enjolivés de manches à volants, de ruches, et de passementeries. La Dress (1990-1991) de Moschino se composait de jacquard synthétique, de passementeries et de dentelles en rose, vert et or, tandis que la Evening Dress (1995-96) de Westwood combinait la soie et le taffetas rehaussés de dentelles roses et argentées. Restant fidèles au camp, les créateurs s’appuyaient sur Marie-Antoinette pour laisser libre cours à leur créativité débridée. Comme le suggère Isherwood : « tu ne peux pas camper sur quelque chose que tu ne prends pas au sérieux. Tu ne cherches pas à te moquer, tu veux plutôt en faire ressortir l’humour[39] ».

L’influence de Marie-Antoinette ne se limite pas aux robes de cour, ni même aux robes en général. Elle ne se restreint pas non plus à la mode féminine. Ses excès de style illustraient un bouleversement progressif, non seulement du vêtement genré, mais plus généralement des normes et des attitudes rigides qui définissaient la société française pour les femmes et les hommes, les épouses et les maris, incluant les reines et les rois. Encore dauphine à Versailles, Marie-Antoinette était déjà réfractaire au comportement qui était attendu d’une femme de son rang, résistance que nous pouvons retrouver dans sa façon d’arborer des tenues et des coiffures masculines. Ce penchant, révélé dans Marie-Antoinette à cheval, faisait écho à sa manière de monter « comme un homme[40] ». Cela correspondait également à l’adoption de conduites et à l’appropriation de privilèges habituellement réservés au roi. Weber qualifie le phénomène de « féminisation sans précédent », citant en exemple les régulations du Trianon qui, contrairement à la promulgation de décrets normalement réservés à l’autorité du souverain, étaient émises « par ordre de la reine[41] ». Cette attitude se manifesterait déjà fortuitement dans le portrait Marie-Antoinette, reine de France, dans lequel la reine affiche une détermination et une maîtrise de soi réservées d’ordinaire à des sujets masculins tels que les rois[42].

Le désir de Marie-Antoinette d’occuper l’espace frontière entre le masculin et le féminin la rapproche davantage de ce qu’on convient d’appeler la fête du camp, où l’androgynie est un invité important, sinon essentiel[43]. Il n’est pas surprenant de voir que la déstabilisation des normes de genre initiée par la reine, les libertés qu’elle prenait en termes de style et de comportement, aient fait beaucoup de bruit. Parmi les rumeurs qui circulaient à son endroit, une prévalait : on la soupçonnait d’être lesbienne. Cette rumeur partait de ses diverses relations avec des compagnes féminines, avec lesquelles elle passait souvent la nuit au Trianon (toujours en l’absence de son mari[44]). Même Vigée Le Brun fut considérée comme une des partenaires sexuelles de la reine, en raison de leur étroite relation et leur évidente admiration mutuelle[45]. Il est peut-être révélateur que, dans Marie-Antoinette, reine de France, la souveraine détourne le regard loin du buste de son mari.

Dans Notes on Camp, Sontag évitait de mettre en exergue le lien entre camp et homosexualité mais bon nombre de critiques l’ont depuis considéré comme inhérent. Ce lien apparaît indéniable dès l’exemple de Versailles. Le frère de Louis XIV, le duc d’Orléans Philippe Ier, en est l’illustration la plus flagrante. Le duc était un noble efféminé, extravagant et fêtard, qui s’habillait parfois en femme et dont la « maîtresse en titre » était en fait un « maître[46] ». Quant à Marie-Antoinette, et malgré les soupçons d’homosexualité qui planaient sur elle à son époque, elle apparaissait plutôt dans Camp: Notes on Fashion comme une figure queer, selon notre conception contemporaine du terme. À travers son regard féministe, Pamela Robertson associe ainsi le camp à un discours queer, celui-ci permettant aux hommes et aux femmes de toutes allégeances sexuelles d’exprimer leur aliénation par rapport aux rôles de genre qui leur ont été attribués par une culture normative[47]. Si nous l’acceptons aujourd’hui comme une icône queer, Marie-Antoinette pourrait être considérée comme la Judy Garland de son époque.

À l’instar de Camp: Notes on Fashion, nous portons un regard rétrospectif sur Marie-Antoinette, un regard évidemment conditionné par les enjeux du présent. Non seulement les connotations associées à la notion de camp mais son attribution même doivent être soumises à une appréciation critique. Répondant à l’affirmation d’Isherwood selon laquelle Mozart et le baroque seraient camp, Booth note qu’ils ne sont en réalité pas camp mais appréciés d’une manière camp[48]. Ainsi Marie-Antoinette, possiblement la plus camp de tous, n’a pourtant été façonnée, comprise et appréciée comme telle que depuis les dernières décennies. À son époque, la reine s’est contentée de dériver vers les marges, son manque de respect des conventions ayant tout simplement contribué à sa perte en popularité (dans son cas, cet écart équivalait à une condamnation à mort). De nos jours, son association au camp la ramène dans un mainstream qu’elle n’a pas pu rallier en son temps. C’est ainsi que nous la retrouvons suspendue contre un mur rose, sous un écran digital, en présence de Dior et en dialogue avec Judy Garland. Marie-Antoinette a nourri l’évolution du camp et, aujourd’hui, le camp l’illumine à son tour.

Notes

[1] Cleto F., « The Spectacles of Camp », Camp: Notes on Fashion, cat. exp., New York, The Metropolitan Museum of Art, 2019, p. 13 : « Camp just happens ».

[2] Voir Isherwood C., « From The World in the Evening », Cleto F. (dir.), Camp: Queer Aesthetics and the Performing Subject, a Reader, Édimbourg, Edinburgh University Press, 1999, p. 49-52 ; Sontag S., « Notes on “Camp” », ibid., p. 53-65 (article originellement publié en 1964).

[3] Cleto F., « The Spectacles of Camp », Camp: Notes on Fashion, cat. exp., New York, The Metropolitan Museum of Art, 2019, p. 41 : « Marie Antoinette and her fashion statements on the backdrop of the French Revolution were possibly the campiest of all. ».

[4] Sheriff M. D., The Exceptional Woman: Élisabeth Vigée-Lebrun and the Cultural Politics of Art, Chicago, University of Chicago Press, 1996, p. 164.

[5] Weber C., Queen of Fashion: What Marie-Antoinette Wore to the Revolution, New York, Henry Holt, 2006, p. 3.

[6] Xavier S., « Marie-Antoinette en grand habit de cour », Marie-Antoinette, cat. exp., Paris, Grand Palais, 2008, p. 142.

[7] Berly C., Louise Élisabeth Vigée Le Brun : peindre et écrire, Marie-Antoinette et son temps, Versailles, Artlys, 2015, p. 102.

[8] Salmon X., « Marie-Antoinette in Court Dress », Vigée Le Brun: Woman Artist in Revolutionary France, cat. exp., New York, The Metropolitan Museum of Art, 2006, p. 72.

[9] Salmon X., « La reine et son image », Marie-Antoinette, cat. exp., Paris, Grand Palais, 2008, p. 136.

[10] Salmon X., « Marie-Antoinette en grand habit de cour », ibid., p. 142.

[11] Salmon X., « Marie-Antoinette en 2008 : chronique d’une exposition », ibid., p. 17.

[12] Salmon X., « Marie-Antoinette en grand habit de cour », ibid., p. 140.

[13] Salmon X., « La reine et son image », ibid., p. 136. Voir aussi May G., Élisabeth Louise Vigée Le Brun: The Odyssey of an Artist in an Age of Revolution, New Haven ; Londres, Yale University Press, 2005, p. 37.

[14] Salmon X., « La reine et son image », Marie-Antoinette, cat. exp., Paris, Grand Palais, 2008, p. 136. Voir aussi Sheriff M. D., The Exceptional Woman: Élisabeth Vigée-Lebrun and the Cultural Politics of Art, Chicago, University of Chicago Press, 1996, p. 164.

[15] Quand le portrait original est arrivé à Vienne en février 1779, il était endommagé. Le tableau avait été reproduit au préalable par un artiste anonyme. C’est cette reproduction qui a été présentée lors de l’exposition du Met. Les demandes de portraits de Marie-Antoinette étaient nombreuses, ce qui posait problème compte tenu de la difficulté de la reine à s’immobiliser pour la pose (Cécile Berly parle d’un « besoin, quasi pathologique, d’être continuellement en mouvement » ; voir Berly C., Louise Élisabeth Vigée Le Brun : peindre et écrire, Marie-Antoinette et son temps, Versailles, Artlys, 2015, p. 106.) Cette agitation encourageait les copies de portraits déjà existants, une pratique facilement acceptée à l’époque dans la mesure où les reproductions étaient quasiment identiques aux tableaux originaux. Il arrivait cependant que les artistes introduisent certains changements en combinant des éléments empruntés à différentes compositions. L’œuvre étudiée dans cet essai en est un parfait exemple : le sujet central reste inchangé mais l’iconographie qui l’entoure a été modifiée, notamment le buste de Louis XVI qui a été supprimé.

Salmon X., « La reine Marie-Antoinette en robe à paniers », cat. exp., Marie-Antoinette à Versailles : le goût d’une reine, Bordeaux, Musée des Arts décoratifs, 2005, p. 88.

[16] Berly C., Louise Élisabeth Vigée Le Brun : peindre et écrire, Marie-Antoinette et son temps, Versailles, Artlys, 2015, p. 105. Voir aussi May G., Élisabeth Louise Vigée Le Brun: The Odyssey of an Artist in an Age of Revolution, New Haven ; Londres, Yale University Press, 2005, p. 37.

[17] Booth M., « Campe-toi !: On the Origins and Definitions of Camp », Cleto F. (dir.), Camp: Queer Aesthetics and the Performing Subject, a Reader, Édimbourg, Edinburgh University Press, 1999, p. 72 (article originellement publié en 1983) : « gaily publicise themselves as immoral ».

[18] Weber C., Queen of Fashion: What Marie-Antoinette Wore to the Revolution, New York, Henry Holt, 2006, p. 123.

[19] Bolton A., « The Beau Ideal », Camp: Notes on Fashion, cat. exp., New York, The Metropolitan Museum of Art, 2019, p. 62.

[20] Bolton A., « Verb », ibid., p. 75.

[21] Ibid., p. 74.

[22] Cleto F., « The Spectacles of Camp », Camp: Notes on Fashion, cat. exp., New York, The Metropolitan Museum of Art, 2019, p. 13, 41-43.

[23] Ibid., p. 39 : « transformed reality into a stage ».

[24] Booth M., « Campe-toi !: On the Origins and Definitions of Camp », Cleto F. (dir.), Camp: Queer Aesthetics and the Performing Subject, a Reader, Édimbourg, Edinburgh University Press, 1999, p. 75-76 (article originellement publié en 1983) : « Louis XIV’s Versailles as a sort of camp Eden, a self-enclosed world devoted to divertissement, to dressing-up, showing off, and scandal ».

[25] Ayant été détruites durant la Révolution, aucune des robes de Marie-Antoinette n’a pu être exposée à New York. La robe à la polonaise était étroitement associée à la cour de Versailles. Des robes de ce genre sont aussi devenues populaires en Amérique, témoignant des relations entre les deux pays. Bolton A., « Sontagian Camp », Camp: Notes on Fashion, cat. exp., New York, The Metropolitan Museum of Art, 2019, p. 131.

[26] Sontag S., « Notes on “Camp” », Cleto F. (dir.), Camp: Queer Aesthetics and the Performing Subject, a Reader, Édimbourg, Edinburgh University Press, 1999, p. 56 (article originellement publié en 1964).

[27] Weber C., Queen of Fashion: What Marie-Antoinette Wore to the Revolution, New York, Henry Holt, 2006, p. 131. Voir aussi Lever É., Marie-Antoinette : un destin brisé, Paris, Réunion des Musées nationaux, 2006, p. 82-83.

[28] Salmon X., « Marie-Antoinette en 2008 : chronique d’une exposition », Marie-Antoinette, cat. exp., Paris, Grand Palais, 2008, p. 17.

[29] Waltisperger C., « Entre mode et tradition, Marie-Antoinette et la nature », Marie-Antoinette à Versailles : le goût d’une reine, cat. exp., Bordeaux, Musée des Arts décoratifs, 2005, p. 25.

[30] Weber C., Queen of Fashion: What Marie-Antoinette Wore to the Revolution, New York, Henry Holt, 2006, p. 132.

[31] Ibid., p. 198.

[32] Salmon X., « Marie-Antoinette en 2008 : chronique d’une exposition », Marie-Antoinette, cat. exp., Paris, Grand Palais, 2008, p. 18.

[33] Pourtant, la reine avait bouleversé les distinctions de classe avec ses expérimentations sur la mode, jouant un rôle phare dans l’évolution du camp en tant que « long processus de démocratisation » (Cleto F., « The Spectacles of Camp », Camp: Notes on Fashion, cat. exp., New York, The Metropolitan Museum of Art, 2019, p. 41 : « a long process of democratization »). Seulement deux années après son premier portrait peint par Vigée Le Brun, Marie-Antoinette, encore dauphine, commença à porter des vêtements à l’antithèse d’une tenue royale acceptable durant ses temps de loisir. Souvent vêtue de blanc, elle affectionnait les robes simples et informes, faites de tissus naturels comme le lin et légers comme la gaze et la mousseline, à l’instar de la tenue portée dans Marie-Antoinette en chemise ou en gaulle. Bien que controversé à ses débuts, ce style devint rapidement à la mode pour les femmes de Paris. Ces vêtements simples empêchaient de distinguer les femmes riches de celles qui ne l’étaient pas, en permettant aux femmes de « basse classe » (Weber C., Queen of Fashion: What Marie-Antoinette Wore to the Revolution, New York, Henry Holt, 2006, p. 150-151 : « “lower birth” ») de passer pour des « femmes distinguées » (Ibid., p. 159 : « ladies of quality »).

[34] Ibid., p. 99.

[35] Booth M., « Campe-toi !: On the Origins and Definitions of Camp », Cleto F. (dir.), Camp: Queer Aesthetics and the Performing Subject, a Reader, Édimbourg, Edinburgh University Press, 1999, p. 76 (article originellement publié en 1983) : « paradigm of high camp society ».

[36] Sontag S., « Notes on “Camp” », Cleto F. (dir.), Camp: Queer Aesthetics and the Performing Subject, a Reader, Édimbourg, Edinburgh University Press, 1999, p. 61 (article originellement publié en 1964).

[37] Weber C., Queen of Fashion: What Marie-Antoinette Wore to the Revolution, New York, Henry Holt, 2006, p. 114.

[38] Ibid., p. 145.

[39] Isherwood C., « From The World in the Evening », Cleto F. (dir.), Camp: Queer Aesthetics and the Performing Subject, a Reader, Édimbourg, Edinburgh University Press, 1999, p. 51 (article originellement publié en 1954) : « you can’t camp about something you don’t take seriously. You are not making fun of it, you are making fun out of it ».

[40] Weber C., Queen of Fashion: What Marie-Antoinette Wore to the Revolution, New York, Henry Holt, 2006, p. 149 : « like a man ».

[41] Ibid., p. 134 : « By Order of the Queen ».

[42] Sheriff M. D., The Exceptional Woman: Élisabeth Vigée-Lebrun and the Cultural Politics of Art, Chicago, University of Chicago Press, 1996, p. 165.

[43] Sontag S., « Notes on “Camp” », Cleto F. (dir.), Camp: Queer Aesthetics and the Performing Subject, a Reader, Édimbourg, Edinburgh University Press, 1999, p. 56 (article originellement publié en 1964).

[44] Weber C., Queen of Fashion: What Marie-Antoinette Wore to the Revolution, New York, Henry Holt, 2006, p. 142.

[45] May G., Élisabeth Louise Vigée Le Brun: The Odyssey of an Artist in an Age of Revolution, New Haven ; Londres, Yale University Press, 2005, p. 39.

[46] Bolton A., « Verb », Camp: Notes on Fashion, cat. exp., New York, The Metropolitan Museum of Art, 2019, p. 75.

[47] Robertson P., « What Makes the Feminist Camp? », Cleto F. (dir.), Camp: Queer Aesthetics and the Performing Subject, a Reader, Édimbourg, Edinburgh University Press, 1999, p. 271 (article originellement publié en 1996).

[48] Booth M., « Campe-toi !: On the Origins and Definitions of Camp », Cleto F. (dir.), Camp: Queer Aesthetics and the Performing Subject, a Reader, Édimbourg, Edinburgh University Press, 1999, p. 67 (article originellement publié en 1983).

Pour citer cet article : Ivana Dizdar, "Camp en mouvement de Versailles au Met : Élisabeth Vigée Le Brun et Marie-Antoinette", exPosition, 9 février 2021, https://www.revue-exposition.com/index.php/articles6-1/dizdar-camp-mouvement-versailles-met/%20. Consulté le 8 novembre 2024.